Cinq mois après l’attentat qui a pris la vie de 33 jeunes turcs au centre culturel Amara de Suruç, la population continue à vivre avec ce trauma. La plupart des réfugiés sont retournés à Kobanê, les camps gérés par la mairie HDP ce sont quasiment vidés. Et la situation de cette petite ville-frontière de 100000 habitants s’est normalisée. Il n’y a plus d’internationaux venus filer un coup de main pour le Rojava. La vie suit son court… Et le travail des flics également, comme partout ailleurs dans le pays : terreur d’Etat ! Une cinquantaine de membres du HDP (le parti pro-kurde) ont été arrêtés la semaine dernière, puis relâchés, avec pour certains l’obligation d’aller pointer plusieurs fois par jours. Le co-maire de la ville est recherché par les keufs qui l’accusent simplement de terrorisme pour être mis en taule. Il a préféré se faire la malle pour se mettre à l’abri. Certains de ses adjoints ont fait de même. Il n’y a plus de mairie donc, et cela devient sujet à blagues : « Si tu sais pas quoi faire, tu peux devenir le maire ! » se disent les habitants entre-eux pour dédramatiser et continuer à rire un peu. La plupart des volontaires et militants un peu actifs autour des camps de réfugiés sont eux aussi arrêtés, gardés-à-vue, puis relâchés et à nouveau recherchés pour les épuiser. Et pour en finir avec cette longue liste des personnes arrêtées, on ne peut oublier de mentionner les frères et sœurs, les familles des jeunes socialistes turcs assassinés lors de l’attentat du 20 juillet. Le climat est tendu et difficile pour tout le monde et les habitants ont peur. Même les derniers habitants du camp de réfugiés Şehit Gelhat reçoivent la visite de plus de 200 militaires : ces derniers y recherchaient quelqu’un. Ils font chou blanc et, du coup, se venge sur le camp, en détruisant l’école et les blocs sanitaires…
Telle est la situation au 15 décembre. Pour autant, comme partout ailleurs au Kurdistan, Suruç ne baisse ni les bras ni la tête. Des manifestations sont prévues pour les jours prochains…